RYTHME et APPRENTISSAGE

Notre vie est souvent rythmée par de belles rencontres. Rencontres qui ne sont pas le fruit du hasard mais de cette synchronisation entre inconscients pour nous faire avancer sur notre chemin.

Ma rencontre avec Carla Hannaford (auteure de la “Gymnastique des Neurones”) lors de ma formation en kinésiologie imprègne encore ma pratique 15 ans plus tard. Deux aspects restent gravés en moi.

  1. sa manière de pratiquer le balancement du Brain Gym

  2. l’importance du rythme dans l’apprentissage

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Commençons par le balancement : dans la version de Dennison, ce mouvement invite à laisser le corps être balancé de gauche à droite, alors qu’on est assis sur les ischions. Exercice de la ligne médiane, le but est de sentir le passage et la fluidité entre les deux côtés du corps et de traverser la ligne.

Le balancement peut se pratiquer de manière individuelle, à deux mais également de manière collective. Si la forme diffère subtilement dans ces variantes, l’esprit reste le même : l’exercice relance le LCR (liquide céphalo-rachidien), lequel transporte des nutriments, des neurotransmetteurs et des hormones. (voir d’autres informations p 28 de “Génial, j’y arrive enfin”)

Installés dos à dos et côte à côte (nous formions une grande ligne) , Carla Hannaford nous invitait à pratiquer un balancement d’avant en arrière. Le jeu était au centre de l’expérience et j’en garde le souvenir de franches rigolades. Mais c’était bien plus que cela.

Enthousiaste de cette adaptation, je l’ai pratiqué avec mon fils, tout en lui apprenant ses premières tables de multiplication. La confiance s’est installée, favorisée par le contact du dos à dos, au travers duquel on expérimente un “je te soutiens, tu peux te laisser aller et te relâcher”, puis un “à ton tour, tu peux me soutenir et me guider”.

Je perçois dans cette variante comme le flux et reflux de la marée, avec un rythme intérieur subtil mais présent. Une pulsation. L’apprentissage de vie au travers de l’exercice, c’est qu’il est sage de savoir alternativement porter les autres et les soutenir mais également de se laisser porter et soutenir. Et se mettre en contact avec ceux et celles qui nous permettront de développer cette bienveillance bienfaisante et cette confiance mutuelle. C’est une des clés fondamentales pour dynamiser les apprentissages.

Peu importe finalement que l’on fasse l’exercice de gauche à droite, ou d’avant en arrière, l’essentiel, est le mouvement continu et la fluidité.

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Autre variante que j’ai beaucoup expérimenté en cabinet , permettant de sortir des blocages ou de retrouver des informations momentanément perdues en raison d’un excès de stress : l’enfant, assis par terre ou sur une chaise, ou éventuellement debout, laisse bouger son bassin, comme une algue au fond de l’eau. Les pieds bien enracinés, il se laisse porter par le rythme naturel, ce flux interne, souple et rond, qui part du corps (et non pas de la tête). On est ici comme replongé ici dans notre vie intra utérine, pendant laquelle le foetus flotte et se laisse porter par les flots et le flux. C’est pour cette raison que j’ai renommé cet exercice “balancement - bercement” .

Fascinante vie intra utérine, pendant laquelle l’embryon en état d’apesanteur entend et écoute tout ce qui se passe autour de lui : les battements de coeur de la maman, les bruits des pas qu’elle fait, le son de sa voix - l’ouïe étant le premier sens à se développer. Ce sens nous accompagnera la vie durant, étant la clé du “bien s’entendre”.

Quant aux parents, ils seront, 9 mois durant, attentifs aux battements de coeur de leur progéniture (battements présents dès le 22ème jour) et quelquefois, aux pulsations de vie présentes dans le cordon ombilical juste coupé.

Ne pourrait-on pas dire qu’il y a ici une dimension yin, féminine, souple, fluide dans ce rythme qui s’exprime tout au long de la vie intra utérine, (des premiers battements cardiaques jusqu’après la naissance) et qui est repris, en quelque sorte, dans l’exercice du balancement ?


Explorons maintenant un aspect plus masculin du rythme dans l’apprentissage.

Tout d’abord, il me semble impossible de développer le sens du rythme (musical)sans être “attentif par l’oreille “.

Le rythme implique souvent le corps tout entier : il rassemble les hommes comme un premier langage, au-delà des différences linguistiques. Se laisser aller à une expérience collective rythmique, en frappant sur des djembés, des tambours, des percussions ou sur n’importe quel autre objet, c’est vivre et partager des émotions communes. C’est la vie qui s’exprime.

Comment intégrer le rythme dans l’apprentissage ?

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Les jeux de mains, (que l’on trouve beaucoup dans les comptines) et le fait de frapper dans les mains, facilitent les apprentissages. Nous savons que les mains occupent une place importante dans l’homonculus et que très souvent, la manipulation et le fait de faire bouger les mains optimise les apprentissages. Surtout pour les apprenants kinesthésiques.

Or les mains sont le prolongement du coeur, qui est lui-même un organe du rythme. Du rythme de la vie !

Le rythme ancre l'apprentissage, nous dit Paul Dennison : il amène de la structure et favorise des états de cohérence par opposition à un certain chaos et désorganisation interne. Il exige de la maîtrise et du contrôle de soi. Il apporte le cadre, avec une dimension plus yang et apporte de l’équilibre physique et mental.

Avoir le sens du rythme est très important pour développer le langage et pour l’apprentissage des langues étrangères qui ont, chacune, une “énergie” différente. Parler italien, russe ou français ne réveille pas les mêmes zones “musicales” : chaque langue a sa propre musicalité, liée à une composante rythmique. A l’intérieur d’une même langue, on a ces mêmes subtilités. Prononcer, par exemple, “to fill” (remplir) ou “to feel” (sentir) ne relève pas du tout de la même expérience : il y a une vivacité dans “to fill” qu’on n’a pas du tout dans “to feel” qui se déploie dans la longueur. Et ceci, seule l’oreille peut vous le faire sentir !

Une pratique musicale régulière , qui repose à égalité sur des aspects mélodique et rythmique, est une bonne école de vie, car elle exige de la concentration, de la discipline, de la persévérance, de l’engagement. Elle développe une meilleure acuité auditive, une coordination plus pertinente et une conscience corporelle plus soutenue.

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C’est dans ce même esprit de pratique musicale que j’aborde les mouvements croisés : j’impose en quelque sorte une régularité métronomique, avec , à peu près, un mouvement par seconde. Peut-être qu’en fait , je me calque intuitivement sur notre rythme cardiaque de 72 battements par minute. L’objectif est bien de faire synchroniser les 2 intelligences et d’atteindre cette coordination, dans le sens de co-ordonner, mettre en ordre.

J’ai souvent constaté que c’est le démarrage du mouvement qui est difficile. C’est justement là qu’il est important d’être exigeant et de ne pas se satisfaire d’une forme de brouillon ou d’à peu près. De la discipline et de la rigueur afin d’atteindre une certaine clarté ! Car c’est cela qui a besoin d’être “éduqué”.

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En fonction de l’âge de celui ou celle qui pratique les mouvements croisés, je propose les enchaînements, avec des mouvements devant le corps, derrière, de côté et en ski de fond. Les moments-clés sont les temps de passage et il ne doit y avoir aucune hésitation. A l’identique de la pratique musicale : les barres de mesure sont là pour donner la structure, mais aucune liberté temporelle n’est permise pour passer d’une mesure à l’autre.


Autre aspect du rythme dans l’apprentissage : il est très utile de superposer les mouvements croisés à une tâche de mémorisation. Mémoriser en rythme (sur le “rythme” - tempo imposé par la gestuelle des cross crawl) demande une grande concentration mais amène une réelle densification corporelle. Ce n’est plus la tête et le cerveau qui travaillent uniquement, mais c’est le corps tout entier qui prend part à la tâche. On est dans une dynamique de jeu et de vie et pour les apprenants kinesthésiques, c’est vraiment la meilleure manière d’apprendre.

Rappelons encore qu’on est plus efficace en mémorisant à haute voix : les muscles de la mâchoire et de la bouche s’engagent de façon dynamique (yang) et l’oreille est plus impliquée de façon consciente (pour autant qu’on fasse vraiment attention à ce qu’on prononce et que l’on ne reste pas dans un acte mécanique).

Pour optimiser les apprentissages, le rythme ici prend une dimension plus yang : il offre le cadre et la structure, un côté organisationnel et temporel. Pour moi, il est propre au cerveau gauche ( oh … je sais, les kinésiologues ne partagent pas cette vision du monde ! Mais je pense que c’est plus la musicienne en moi qui s’exprime que la kinésiologue).

Selon les contextes et selon les objectifs à atteindre , on choisira plutôt un exercice à tonalité rythmique féminine ou masculine. En se posant la question, de quoi a-t-on besoin pour se mettre en mouvement ? Cette réponse est, bien évidemment, propre à la sensibilité de chacun. L’important est de se sentir unifié.

Il y aurait tant d’autres réflexions à amener sur cette notion de rythme, mais l’essentiel de ce que j’ai encore envie de vous partager, c’est :

« Mettez-vous ou restez à l’écoute de votre rythme intérieur et développez le sens du rythme pour votre propre vie. C’est vous-même qui détenez la clé de votre existence. »

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